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Opium

Résultats de l’enquête officielle d’addictovigilance des médicaments contenant de la poudre d’opium

Rapporteur CEIP-Addictovigilance Nancy

Version : Janvier 2017

Comité technique des CEIP-Addictovigilance, ANSM

Il a été octroyé une AMM en 1999 à la spécialité Lamaline® gélule, dans l’indication du « traitement symptomatique des douleurs d’intensité modérée à intense et/ou ne répondant pas à l’utilisation des antalgiques périphériques utilisés seuls ». Après des échanges entre l’Agence et le laboratoire titulaire, Solvay puis Abbott, une réunion a été organisée en 2008 concluant à l’absence d’efficacité clinique (pharmacologique et cinétique) de la caféine et des doses optimales de paracétamol et de poudre d’opium. Dans ce contexte, le laboratoire a développé une nouvelle formule avec des doses de paracétamol et de poudre d’opium augmentées (respectivement 500 mg et 25 mg contre 300 mg et 10 mg auparavant). Une AMM a été octroyée pour Lamaline® 500 mg / 25 mg, gélule en octobre 2010 dans l’indication du « traitement symptomatique de la douleur aiguë d’intensité modérée à intense et/ou ne répondant pas à l’utilisation des antalgiques de pallier 1 utilisés seuls ». Afin de prévenir toute erreur médicamenteuse, la dénomination de la spécialité Lamaline® 500 mg/25 mg a été modifiée en Izalgi® (gélule) commercialisée depuis mai 2015.

 

Par voie orale, 10 mg de poudre d’opium correspond à 1 mg de morphine.

L’enquête d’addictovigilance réalisée en 1997 avait conclu que la spécialité Lamaline® présente un potentiel d’abus et de dépendance identique aux autres opiacés. En 2003, une mise à jour des données d’addictovigilance et de pharmacovigilance met en évidence un risque de pharmacodépendance en cas d’utilisation prolongée et à des doses suprathérapeutiques de Lamaline.

Le 8 mars 2011, un suivi national d’addictovigilance et de pharmacovigilance est officiellement mis en place à la suite de l’octroi de l’AMM pour la nouvelle formulation contenant 25 mg de poudre d’opium.

Un premier point du suivi d’addictovigilance a été présenté au comité technique des CEIP-addictovigilance du 22 novembre 2012 (données janvier 2000 à décembre 2011). Il a permis d’établir un profil type des sujets « abuseurs/dépendants » : femme, 50 ans, antécédents psychiatriques, effet principal recherché antalgique, associations fréquentes de médicaments à visée antalgique et anxiolytique.

 

LAMALINE

Une actualisation des données du suivi d’addictovigilance de la LAMALINE sur la période janvier 2012-juin 2016 a permis d’analyser 148 cas notifiés.

  • 104 cas avec une consommation problématique (65 cas d’abus et/ou dépendance, 33 cas de mésusage, et 6 cas de syndrome de sevrage),
  • 44 cas d’IMV/TS (Intoxication Médicamenteuse Volontaire et/ou Tentative de Suicide).

 

Les 104 cas d’abus/dépendance/mésusage sont en augmentation en comparaison de la période précédente d’étude et concernent en majorité des femmes (75 %). Les patients sont âgés en moyenne de 50 ans. Dans plus de 40 % des cas où la durée de prise est renseignée, celle-ci est supérieure à 6 ans. Sur les 84 cas où l’effet recherché est renseigné, une majorité (92 %) concerne un effet antalgique. Les indications sont principalement des céphalées/migraines pour 29 cas (dont 16 patients avec apparition de céphalées induites par l’abus d’antalgiques), des douleurs rhumatologiques et post-traumatiques pour 25 cas, et des douleurs sans autre information pour 16 cas. On relève quelques indications pour des douleurs dentaires, des douleurs neuropathiques, des douleurs gastro-intestinales ou encore des douleurs de fibromyalgie. 31 % des patients présentent des antécédents psychiatriques et 59 % des sujets ont des antécédents d’abus ou de mésusage d’autres substances, licites ou illicites. La grande majorité d’entre eux associent des antalgiques et/ou des anxiolytiques ou hypnotiques. Dans les 8 % des cas, on retrouve la recherche d’un effet psychique.

 

IZALGI

5 cas ont été notifiés en 2016 dont 3 cas d’usage problématique et 2 cas d’intoxication médicamenteuse volontaire à visée suicidaire.

 

Le suivi national des spécialités contenant de la poudre d’opium confirme le potentiel d’abus et de dépendance ainsi que les risques de surdosage. Le risque de complications hépatiques dû au paracétamol (1 cas de décès a été signalé hors IMV/TS) et le risque majoré de détournement avec Izalgi® est important. Le comité s’interroge sur la pertinence de considérer un médicament antalgique contenant de la morphine (1 à 3 mg par unité de prise et jusqu’à 10 à 18 mg de morphine par jour) comme un antalgique opioïde dit faible. Ces médicaments ont la puissance d’antalgiques forts.

Le pourcentage de durée de prescription supérieure aux 10 jours recommandés dans l’AMM étant d’ores et déjà important, il semble important de rappeler aux prescripteurs les conditions de prescription et de délivrance, ainsi que les risques d’abus, de dépendance et/ou de détournement de ces spécialités et les risques de toxicité associés.